Magazine Avant-Goût

67 Avant- Goût uand nous picorons une grappe de chasselas ou de muscat, nous sommes tous un peu les héritiers des chasseurs-cueilleurs préhistoriques qui se gavaient de raisins sauvages.Car l’humanité a mangé le fruit depuis la nuit des temps avant d’en faire du vin.Dans Raisins (éd. Plume de carotte, 2011), Serge Schall écrit : « Entre la vigne, le raisin et l’homme c’est de l’histoire ancienne, les preuves ar- chéologiques montrent qu’au néolithique la vigne sauvage Vitis vinifera subsp. vinifera offrait ses fruits aux populations au moins depuis le paléolithique inférieur il y a 120 000 à 500 000 ans.En France,on a retrouvé des pépins dans la région de Nice, sur le site de Terra Amata, datée de 400 000 ans. » Dans Histoire de l’alimentation,de la préhistoire à nos jours (éd.Belin),on apprend que lors d’un banquet du roi d’Assurna- sirpal, roi d’Assyrie au ix e siècle av. J.-C., il y avait notamment cent réci- pients de raisin. Plus tard, l’empereur romain Auguste (63 av. J.-C.-14 apr. J.-C.) se contente pour sa collation de milieu de journée (le prandium ) de pain,de raisin et de dattes.Dans La Cuisine romaine antique (éd. Glénat,2020),Nicolas Blanc et Anne Nercessian évoquent un drôle de rite des Romains autour des grains : « Les superstitieux s’exerçaient, en pressant les pépins entre le pouce l’index, à viser le plafond : si on réussissait à l’atteindre,c’était une promesse de succès. » L e « raisin de n oëL » Si le fruit de la vigne était ainsi chouchouté, il ne faut pas se leurrer : il servait d’abord à faire du vin, les légionnaires romains enseignant UN PEU D’HISTOIRE... Le raisin Le raisin sert, bien sûr, à la production de vin. Le raisin, évidemment, se déguste en fruit depuis la nuit des temps. Mais il participe aussi à la composition de nombreux plats. Q cet art à nos ancêtres.Au Moyen Âge, c’est surtout la saveur acide des raisins verts qui excite les papilles. Ils entrent dans la com- position du verjus,qui est un rival sérieux du vinaigre,comme le note Jeanne Bourin dans Cuisine médiévale pour tables d’aujourd’hui (éd. Flammarion).Elle écrit : « On a tout à fait oublié à présent ce fond de sauce acide préparé à partir de feuilles d’oseille, de jus de citron ou de raisins verts, d’où il tirait son nom. » Jeanne Bourin cite une sauce aux raisins frais dite « saulce rappée » extraite du Viandier deTaillevent ,une sorte de best-seller de la cuisine médiévale. © Bardo Museum Tunis/Gianni Dagli Orti/Aurimages C’est sous le règne de François I er (1494- 1547) que le raisin acquiert ses lettres de noblesse à table avec le fameux chasselas doré de Fontainebleau, également appelé chasselas de Thomery, planté sur la treille royale.Grâce à une méthode de conserva- tion originale, il est le « raisin de Noël » dont on peut prolonger la dégustation jusqu’à Pâques et même jusqu’à début mai.À son Grappes de raisin blanc et noir. Mosaïque provenant du pavement d’un triclinium de Thysdrus (aujourd'hui d’El Djem, fin du II e siècle). Dionysos, le dieu grec du vin, et Ariane. Ce vase daterait du VI e siècle av. J.-C. AKG-Images

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